Danza de la realidad, La

Alejandro Jodorowsky, 2013 (Chili)




C’est un peu comme Les plages d’Agnès. En 2008, Agnès Varda, 80 ans, revenait sur sa vie, sur ses plages et dans un film frais, y mettait toute sa liberté, ses rencontres, son cinéma, ses installations, des acrobates, des miroirs, et bien d’autres choses. Jodorowsky, 84 ans, fait de même. Un film fantasmant son enfance, son père en admiration devant Staline, une mère cantatrice fellinienne, des plages aussi, plus mystiques et à l’occasion visitées par Les oiseaux, des estropiés et un théosophe de BD, un dictateur et son palefrenier… Ça ressemble aux Plages d’Agnès, la fraîcheur en moins.

Le préambule concerne des facilités sur l’argent qui régit le monde, puis Jodorowsky nous introduit dans le cirque de la vie qu’il définit plus ou moins avec un loup, des clowns, un combat de boxe, et jamais ne cesse la succession d’images en un long cortège… Moins complexe qu’elle n’y paraît, La danza de la realidad se décompose ensuite en deux temps, l’enfance difficile du fils d’un communiste juif dans les années 1920 et les mésaventures d’un paternel manquant de se réconcilier avec le Christ après avoir manqué d’abattre Ibáñez.

L’engagement politique et le tableau surréaliste composé des souvenirs supposés du réalisateur ont cependant leur intérêt. Comme si Buñuel et Saura étaient passés à la moulinette de la Movida le tout transposé au Chili. Le film oscille ainsi bizarrement entre un occulte assez compréhensible (symboles bibliques, maçonniques, mythologiques…) et des images crues qui au contraire ne dissimulent rien (ni moignon, ni sexe, ni selles). Plus scatologique qu’eschatologique, le film ne manque pas une occasion par exemple de réduire la religion à une simple excrémentation.

A lire les critiques (Positif, Télérama, Chronic’Art…), les amateurs de Jodorowsky sont contents de découvrir l’enfance de l’artiste et d’y trouver des clefs de lecture à ses œuvres, mais on se demande aussi si le grand âge du monsieur ne les rend pas trop indulgents. Tous se réjouissent d’un Jodorowsky retrouvé (plus de vingt après Le voleur d’ac-en-ciel), mais aucun ne parle d’inspiration. Nous, on s’ennuie plutôt devant ce spectacle très poussif.

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Une réponse à “Danza de la realidad, La”

  1. Le documentaire Dune de Jodoroswky, de Frank Pavich (2013), permet d’apprécier différemment La danza de la realidad et de cerner différemment la créativité de cet auteur. Il y a par exemple une image forte dans laquelle Jodoroswky empoigne une liasse de billets dans sa main et fixe la caméra en crachant tout le mépris qu’il a pour l’argent (en écho avec le préambule évoqué ci-dessus). Probablement les idéaux soviétiques de sa famille y sont pour quelque chose mais l’avortement douloureux du projet Dune pour des questions budgétaires doit également avoir pesé (et cela même s’il a pu reprendre plusieurs des idées qu’il avait eu pour Dune dans des œuvres ultérieures).

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