Peyton Reed, 2015 (États-Unis, Royaume-Uni)
Entre L’Ère d’Ultron (Whedon, avril 2015) et Captain America : Civil War (mai 2016), arrivant en fin de phase II (se référer au vaste plan de conquête des écrans de l’univers cinématographique Marvel), Ant-Man c’est un peu la tentative d’un contre-pied. En effet, les super-héros, après dix ou quinze ans, confortablement installés dans le paysage cinématographique et désormais à peu près tous les trois mois dans une nouvelle aventure (les grosses productions super-héroïques débitées aux cadences industrielles dans une scientifique alternance Marvel-DC, Deadpool en février 2016, Batman v Superman en mars… sur un calendrier grévé à l’occasion par de « téméraires indépendants »), ont pris pour habitude de faire de colossaux dégâts. Ant-Man, lui, et mieux développé cela aurait pu être la véritable originalité, ne se livre qu’à de la micro- destruction, de la casse au millimètre, dans une histoire avec fourmis et drôles d’insectes dont on ne retiendra finalement que très peu de choses. D’une part un revers avec raquette de ping-pong pour envoyer Yellowjacket (oui, oui c’est le nom du vilain) dans une lampe à griller les moustiques. D’autre part une comparaison inattendue avec Interstellar (2014). Nolan explorait l’univers, séparait le père de sa fille et les plaçait à des années-lumière d’intervalle ; dans Ant-Man c’est l’échelle sub-atomique qui est visitée, père et fille étant ici aussi séparés par d’infranchissables distances (le personnage de Scott Lang, père taulard et malchanceux, nous rappelle un peu, la tristesse du regard exceptée, celui de l’Homme-Sable dans Spider-man 3 de Raimi, 2007). L’immensément grand d’un côté, donc, l’immensément petit de l’autre. Et pour ramener le père, la même jolie formule : une chambre d’enfant et tout l’amour d’une fille. Pour le reste, c’est des accents latinos dont on profitera certainement en version originale, quelques blagues un peu vaseuses, sans trop, des acteurs qui tiennent malgré tout la route (Evangeline Lilly, Paul Rudd, Michael Douglas) dans un univers (Les gardiens de la galaxie de Gunn en possible marqueur ?) de plus en plus farfelu.
Voilà un costume taillé sur mesure pour L’homme qui rétrécit. Pas de quoi secouer la fourmilière superhéroïque et pourtant, en effet, ce petit gars qui fait profil bas se montre assez touchant, aux dehors très sympathique, tout à fait à la hauteur de la chambre d’enfant où même les plus âgés d’entre nous sont restés sans doute quelque part.
Tu fais allusion à L’homme qui rétrécit de Jack Arnold (1957), et c’est aussi le titre de ton article : cela me rappelle une autre scène intéressante du film. Le rétrécissement (accidentel ?) du héros dans la baignoire. On y est plus inquiet que dans la scène finale face au train miniature (car au milieu des jouets, la scène d’action tire par moment vers la comédie). Ainsi, la baignoire devient une prison aux parois infranchissables. Malheureusement, la fin de cette scène est bâclée et le réalisateur lui retire tout enjeu. L’homme fourmis se laisse porter par l’eau et sort de la baignoire à la faveur d’un grand éclaboussement. Par rapport au film de Jack Arnold, il manque à Ant-Man l’inquiétude et la menace liées à l’environnement quotidien et à l’insignifiant (la scène de la baignoire est la seule du genre). Une piste manquée.