Daniel Espinosa, 2022 (États-Unis)
Le vampire n’est plus qu’un cadavre sans attrait expulsé d’une horreur protéiforme à trois têtes, Disney-Marvel-Sony, plus intéressante en soi que ses propres rejetons industriels. L’insistance donnée au nom d’un navire, le Déméter, eut voulu nous faire croire un instant à la relecture du Dracula de Stoker par le double prisme du cinéma et du super-héroïsme ; autrement dit un mythe (le vampire) dans les bras d’un autre mythe (le super-héros). Mais les références les plus nobles disparaissent dans le brouillard d’un scénario et surtout d’une réalisation médiocre et tapageuse, où les effets spéciaux, c’est une habitude, brouillent et abîment plus qu’ils n’émerveillent.
Le récit des débuts de Morbius n’a rien pour se distinguer des introductions précédentes, de tel personnage ou de tel autre, qui tout extraordinaires soient-ils, ne sont en définitive que les protagonistes à peine fantastiques d’histoires devenues banales. Qu’est donc Morbius ? Un copier-coller Disney, un paquet sur une chaîne de montage, un film trait d’union qui n’a d’intérêt que d’occuper les écrans jusqu’au prochain décalque, incidemment de fabriquer un prochain adversaire à Spider-Man. L’univers est le même et une anomalie, comme un bogue dans la machine, nous plaçait déjà face à un comparable bégaiement industriel. En effet, Spider-Man : no way home de Jon Watts en 2021 et Spider-Man: Across the Spider-Verse de Joaquim Dos Santos en 2023 fabriquaient des intrigues traversées par des personnages vus ailleurs et des héros démultipliés ad nauseam où tout risque à tout moment de ressembler à tout. Ces exemples malgré tout parvenaient, quoique non sans mal, à divertir. Morbius, lui, ennuie.
Le produit ne se distingue en rien du même sorti plus tôt ou de son équivalent prévu sans délais (Venom de Ruben Fleischer, 2018, Venom: Let There Be Carnage d’Andy Serkis, 2021, Venom: The Last Dance de Kelly Marcel, 2024…). Pseudo Jekyll et Hyde, Morbius pour blaguer se présente à ses victimes sous le nom de Venom. Il n’est pas si sûr que cette identité ne soit pas réellement la sienne et son personnage œuvrer en schizophrène total. Étrange cas que le sien ? Quelconque en vérité.
Morbius est tout de même de bien meilleure facture et d’un acteur autrement plus convainquant et crédible que dans l’immonde Venom qui a malheureusement eu une suite.
Disons Jared Leto cabotine moins que Tom Hardy, et encore.