Highlander

Russell Mulcahy, 1986 (Royaume-Uni, États-Unis)

DES ÉPÉES ANTIQUES AU TEMPS DE LA GUERRE FROIDE:
« THERE CAN BE ONLY ONE »

Découvert enfant ou adolescent, j’ai toujours bien apprécié ce film. Il a ses défauts. Il a pas mal vieilli. D’abord, ce qui est un peu bizarre, tout le monde écoute Queen (dans les voitures, dans les bars, en toute situation). Le jeu des acteurs est limité (Christophe Lambert sympathique mais peu expressif, Clancy Brown trop expressif). La mise en scène est souvent approximative (même si des raccords temporels restent ingénieux et plutôt bien sentis). Dès le début, ça part assez vite en vrille : visions amenées lourdement, saltos improbables et acrobaties pour l’épate rendent le premier combat ridicule.

Pourtant, ce film de capes et d’épées, où les capes sont remplacées par des impers, est un petit peu plus que cela. Le seul résumé est fascinant : une histoire de duellistes immortels qui se traquent à travers l’Histoire, à toutes les époques, dans tous les contextes. Ainsi, Connor MacLeod, antiquaire new-yorkais contemporain, est replongé au temps de sa jeunesse, quand il était membre du clan MacLeod, en Écosse, au début du XVIe siècle. Plus tard, un autre flash-back nous le fait voir durant la Seconde Guerre mondiale secourant une fillette orpheline (sa future secrétaire et assistante). Un dernier regard en arrière nous fait témoins au XVIIIe siècle d’un duel comique contre un gentilhomme offensé qui ne comprend pas pourquoi, décidément, son adversaire percé à plusieurs reprises par sa lame se refuse à mourir. Ce jeu de va-et-vient sur la ligne de temps offre un potentiel de décors, de costumes variés et d’exotisme auquel ont d’ailleurs cru les producteurs qui se sont succédé sur la franchise (une suite a été envisagée en dépit de l’échec financier du premier épisode, Highlander, le retour en 1990, puis trois autres films, ainsi que deux séries).

Je trouve amusant de revoir le film et de trouver une dimension qui m’avait totalement échappé dans les années 1980 ou 1990, à savoir le contexte géopolitique. Car les allusions à la Guerre Froide sont pourtant claires. Si l’on commence par MacLeod, le personnage est bien un homme de l’Ouest. D’origine écossaise, il est installé aux États-Unis, non pas caché dans la pampa du Middle West, mais ayant pignon sur rue (dans tous les sens du terme) à New York. Un commerçant sélect installé dans la capitale économique occidentale, vivant dans une tour ou un loft (c’est aussi l’adresse de sa boutique), un Élu (encore un) par dessus le marché. Moins cosmopolite qu’on pourrait le croire (l’acteur est français et son accent étrange), MacLeod est un homme d’affaires et un guerrier. Il incarne donc par là deux aspects de la puissance américaine, économique et militaire (même si son arsenal à lui ne se limite qu’à des claymores et des katanas).

Son adversaire est un Kurgan, de la tribu des Kurganes. Autrement dit un Russe présenté au détour d’une réplique comme un monstre sanguinaire s’en prenant aux enfants (propagande de déshumanisation habituelle). Son look est un mélange de punk et de Terminator (Cameron, 1984). L’acteur lui-même, Clancy Brown, a le physique des hommes de mains que cognent régulièrement James Bond. À côté de ces deux personnages principaux, on remarque au détour d’une ruelle sombre un rôle secondaire (joué par l’acteur Christopher Malcolm). Un ancien militaire armé jusqu’aux dents parcourt la ville à bord d’une voiture de sport pour livrer sa propre justice dans les quartiers malfamés. Quand il croise le Kurgan, le gars a le malheur de porter un t-shirt par trop explicite (Moscou dans la cible d’un missile US). Et, après quelques rafales de circonstances, le sort du « vigilante » est fait, à cracher son sang au-dessus de l’épée du barbare immortel.

Pour rappel, « l’assemblée » qui doit se tenir quand les immortels ne sont plus que quelques-uns a lieu à New York. C’est sur ce territoire qu’il s’agit de faire venir les derniers ennemis afin « qu’il n’en reste qu’un ». Selon la légende qui accompagne Highlander, le dernier épéiste survivant recevra « le prix » (un pouvoir immense) grâce au phénomène du « quickening » avec des éclairs partout. On en déduit que la récompense ne pouvait être qu’américaine. Il ne peut en rester qu’un : le Kurgan finit décapité par la lame nippone de l’antiquaire au drôle d’accent, comme l’année d’avant Stalone écrasait de ses poings Dolph Lundgren (Rocky IV, Sylvester Stalone, 1985) et puis dans le monde réel, c’est encore le cas puisque la Guerre Froide s’achève lors de l’effondrement de l’URSS en 1991.

Highlander a ses défauts, mais Juan Sanchez Villa-Lobos Ramirez, le mentor de Connor, est un beau personnage. Il est incarné de plus par Sean Connery qui à lui seul rattrape tout le casting. Je suis très premier degré et, sur le superbe « Who wants to live forever », le vieillissement puis la mort de Heather (Beatie Edney), alors que son amant est resté jeune, est une scène qui me touche.

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