Paul Thomas Anderson, 2007 (États-Unis)
Un sol aride et désert, deux collines en plan fixe, et un son, une note, qui monte et crée une angoisse : le procédé est emprunté à 2001 : l’odyssée de l’espace (la vue du monolythe) et annonce une menace, celle du titre, qui est le résultat de toutes les tensions et les frustrations cumulées durant le récit. Cette première image qui ouvre le film combine déjà tout ce que le film concentre : ce sol, américain en l’occurrence, pauvre en apparence, et une ambiance quasi mystique. Le sol c’est Daniel Plainview (Daniel Day-Lewis) qui l’incarne, le self-made man dont Paul Thomas Anderson entreprend de raconter l’histoire. Les premières scènes nous montrent cet homme au fond d’un trou en train de piocher et casser la roche à la recherche d’or et d’argent. Il se blesse dans ce puits mais qu’importe, l’important est ce qu’il trouve au fond. Après avoir mis la main sur le précieux minerai, il s’extrait du trou et le spectateur a l’impression que ce sont les entrailles de la terre qui le mettent au monde. L’aspect mystique se retrouve dans le personnage d’Eli Sunday (Paul Dano), prêtre et prophète qui, lui, cherche à faire de son Eglise une institution influente. L’histoire prend place aux Etats-Unis, au début du XXe siècle, de l’apogée de la seconde révolution industrielle à la crise de 1929. C’est donc l’avènement de l’Amérique moderne que nous voyons à travers ces deux individus : la toute puissance du capitalisme s’installer et la religion s’adapter au monde moderne, l’un se servant de l’autre et inversement pour se développer. Comme de nombreux films biographiques (et Citizen Kane en premier lieu puisque c’est surtout à ce film qu’a été comparé There will be blood), nous assistons à la gloire du personnage avant de le voir plonger dans la déchéance. La vie de Daniel Plainview suit ainsi la courbe de croissance économique du pays. Plainview fait fortune avec l’exploitation de gisements pétroliers : il rachète à petit prix les terres d’exploitants agricoles regorgeant d’or noir et fait élever les derricks qui lui permettent forage et extraction. Les premiers mots que l’on entend dans le film font partie du discours que l’entrepreneur tient à chaque communauté à qui il envisage le rachat de terres : on pense tout d’abord au patron paternaliste tel qu’il en existait à cette époque-là (il nourrit ses ouvriers et leur famille, les installe à proximité du lieu de production, les surveille…), mais Plainview est un misanthrope qui n’envisage que l’enrichissement personnel. Il utilise les autres pour parvenir à ses fins, trompe et assassine. Il préfère s’occuper d’une nouvelle source de pétrole que de son garçon blessé par une explosion de gaz. Enfin, il est le dernier entrepreneur indépendant et refuse catégoriquement toute association ou tout compromis avec les compagnies d’exploitations pétrolières en plein développement. Pourtant, Plainview est contraint à l’association, même tacite, avec ce prêtre sans lequel il ne peut racheter toutes les terres convoitées. Le spectateur est fixé quant aux objectifs du prêtre lors d’une scène. Il va trouver Plainview pour lui proposer un marché ; nous le voyons alors descendre d’une colline vers un ciel reflété dans la large étendue de pétrole : le prophète atteindra le ciel par le biais de l’or noir. Les deux hommes s’humilient tour à tour afin d’obtenir satisfaction et ce jusqu’à l’exutoire final où même la musique, qui était jusque-là saccadée et percussive (comme des coups de marteaux et de pioches mais aussi comme les relations humaines décrites), devient mélodique et enjouée. S’il ne réalise pas un chef d’œuvre (le temps nous le dira), Paul Thomas Anderson réalise au moins un très bon film où les images servent de façon convaincante une histoire qui comporte plusieurs degrés de lecture.
Bafouille rapide car pas trop de temps sur mes impressions du fameux film récemment oscarisé (enfin l’acteur plutôt):
Enorme.
Grande saga qui rappelle les très grands films du cinéma des années 1960 et 70, tourné presqu’à la façon d’un western. Musique dissonante, dérangeante tout le film qui donne une impression de malaise constant.
Grande fresque sur les pionniers du pétrole aux Etats-Unis avec un acteur réellement monstrueux et inégalable : Daniel Day Lewis. Il vit véritablement son rôle et à part mes chouchoux De Niro et Al Pacino de la grande époque, je ne vois pas qui aurait pu jouer ce rôle (Nicholson à la rigueur). C’est clair que c’est lui qui tient le film du début à la fin.
Après c’est pas du tout un film grand public, même plus pour cinéphiles avertis alors je sais pas s’il fera beaucoup d’entrées ici (peu importe) mais je vous le conseille vraiment !
J’ai vu le film hier, j’ai adoré. C’est une grande fresque dramatique et cynique sur les débuts de l’exploitation pétrolière au debut du XXème siècle. La performance de Daniel Day-lewis est, comme d’habitude, remarquable. La fin est complètement inattendue et déconcertante. L’ambiance est très oppressante menéé par une musique forte qui m’a fait penser à un groupe franco-autrichien de néo-classique experimntal nommé Elend. Bref, un grand moment de cinéma.
Quel film ! Le meilleur pour ma part en ce début d’année avec Into the wild de Sean Penn.
Mais revenons au sujet : business, famille, religion, ces thèmes naissants (qui sont la base de l’Amérique d’aujourd’hui) sont développés à merveille.
S’il est vrai que Daniel Day Lewis porte le film (cela a déjà été fort et bien dit) il ne faut pas le dissocier du réalisateur, Paul Thomas Anderson, qui nous livre des images sublimes, ni de Paul Dano. Ce dernier interprête de manière magistrale ce prêtre, prophète de La Troisième Révélation, dont les mots criés de la scène finale (sous la contrainte d’un Daniel Plainview rongé par l’alcool) resteront longtemps gravés dans nos mémoires :
« I am a false prophet !
God is a superstition ! »
Du Grand cinéma ! (et merci Upton Sinclair)
There will be blood est un film comme on en faisait plus (ou rarement de nos jours). Des acteurs qui nous prennent aux tripes, un décor fidèle à l’époque, une bonne histoire qui accroche jusqu’à la scène finale! Et une bande-son quasi-parfaite… Ce film est d’ores et déjà culte.
Après quelques mois et une deuxième vision, le chef-d’œuvre est bien là.
La dernière séquence offre un final complètement inspiré par les œuvres de Kubrick, Orange mécanique (1972) ou bien Shining (1980) : une maison aux pièces vastes et vides, une violence soudaine et brutale, la dernière parole de Daniel Plainview « I have finished« , le concerto pour violon et orchestre (en D majeur, op. 77) de Johannes Brahms (alors que Kubrick utilisait Strauss ou Beethoven), enfin le titre « There will be blood » qui rappelle la prédiction annoncée et qui s’abat sèchement tel un rideau tiré.
J’ai pas du tout aimé. Je m’étais ennuyé. J’avais trouvé le scénario assez pauvre, avec pas mal de longueurs, malgré de bons acteurs (dans mon souvenir). Et pourtant, j’aime le cinéma lent, le reproche de lenteur n’est pas un que je donne souvent.
Enormissime chef-d’oeuvre, tout y est gigantesque de génie et de talent. Podium des meilleurs films 2000… 4/4