Guillaume Canet, 2006 (France)
Exemple parfait pour illustrer le discours de Bertrand Tavernier sur l’asservissement des personnages à l’intrigue*, Ne le dis à personne est l’adaptation d’un polar de l’écrivain à succès américain Harban Coben. Expert dans les récits plein d’angoisse (qui ne sont plus seulement prisés sur les plages et dans les trains), Coben semble offrir dans ses thrillers rythme et rebondissement aussi appréciés dans le genre policier exploité par le cinéma.
Après deux ou trois tentatives, longues (Mon idole, 2002 avec François Berléand et Diane Kruger) ou courtes (Sans regrets, 1995, son premier film auquel participe Marina Hands), et plutôt dans la comédie, Guillaume Canet s’essaie au policier. Tout n’est pas mauvais dans ce film mais il ne faut pas en attendre beaucoup. L’histoire est alambiquée et oblige à des explications récapitulatives longues de plus de quinze minutes avant l’épilogue. Le dernier rebondissement n’apporte rien si ce n’est un poids supplémentaire dans un récit déjà lourd. Les personnages n’existent pas sauf par leurs actions et parce que le scénario a tant d’importance, le spectateur s’amuse à relever ses facilités et ses incohérences (les flics qui paraissent mauvais au début mais s’avèrent bien sympathiques ensuite, l’énorme secret gardé bêtement huit ans par la sœur qui, s’il avait été révélé plus tôt, aurait évité bien des malheurs, etc.). La mise en scène est inégale et quelques bonnes idées se mélangent à plusieurs grossièretés. Ainsi, la première séquence, quasi rêvée par le protagoniste principal, ou la chute du cheval associée à l’arrestation de l’instigateur des crimes commis sont plutôt bien vues. Retenons aussi l’efficacité de la course-poursuite à pied dont l’impressionnante traversée de périphérique constitue le point fort. En revanche, l’être aimé magnifié par une caméra « flottante » et, surtout, les aveux du flic insoupçonné, père de la prétendue victime, arrosés d’alcool et de grosses gouttes de sueur sont maladroits.
Ne le dis à personne ressemble à un bel amusement pour Canet. Il y fourre tout ce qui lui plaît : de grands acteurs (André Dussollier, Jean Rocheford), des copains (François Cluzet qui est cependant un bon choix, François Berléand, Gilles Lelouche, Marina Hands, Kristin Scott Thomas, Nathalie Baye…), un rôle de méchant qu’il se réserve mais joue mal, deux morceaux de musique pour faire un bout de clip… Olivier Marchal, qui est caution d’un certain réalisme policier et qui a certainement dû faire profiter le jeune réalisateur de ses conseils d’ancien homme de terrain lors des scènes d’action, est cantonné dans un rôle de figurant. L’amusement est rendu bien lourd par toute la garniture…
Comme les caméos et les clins d’œil multiples qu’il contient, Ne le dis à personne demeure anecdotique. Peut-être, s’il réalise un autre polar, Guillaume Canet devra-t-il préférer la simplicité à l’esbroufe…
* Voir notre commentaire du film Dans la brume électrique et l’émission Projection privée du 11 avril 2009 dans laquelle M. Ciment recevait B. Tavernier.
Personnellement, et sans chercher à être trop analytique, j’ai plutôt apprécié ce polar/thriller à la française: un scénario (dont le rebondissement final attendu est certes un brin « too much ») efficace, du rythme, du suspens, de bons acteurs… Non vraiment j’ai pris beaucoup de plaisir à le voir. Il y a bien mieux mais aussi franchement bien pire ! Avec Guillaume Canet et François Cluzet, j’avais surtout adoré Les liens du sang, mais pour moi ce film est un très bon divertissement et donc une réussite car il remplit pleinement sa fonction.
François Cluzet est génialissime dans ce film. Très bien réalisé par un Guillaume Canet qui devait avoir à ses côtés une bonne équipe de tournage.