Martin Deus, 2019 (Argentine)
Dans ce premier long métrage, Martin Deus se focalise sur la relation entre deux adolescents. Le premier, Lorenzo (Angelo Mutti Spinetti) est sage et studieux, pas forcément très bon au foot, pas forcément très nul avec les filles. Le second Caito (Lautaro Rodríguez) a des problèmes chez lui et Andrès, qui est un ancien ami de son père, a proposé de l’héberger quelques temps. Il n’a pas le même physique que Lorenzo, ni les mêmes préoccupations. Moins à l’aise avec un livre qu’avec une bouteille de bière, il est surtout un facteur de chaos au sein d’une gentille famille très ordonnée.
Toutefois, ce « chaos » est tout relatif car on s’étonne un peu de la tranquillité, pour ne pas dire de la stabilité, du gamin. Fils d’un père qui a fait de la prison et qui se drogue, il a lui-même des tatouages comme s’il faisait partie d’un gang. Il est bagarreur et s’il n’est plus chez lui c’est qu’il a envoyé son demi-frère entre la vie et la mort. Pourtant, en dépit d’une ou deux incartades, il se plie assez bien aux règles de vie de sa famille d’accueil. Voyou mais pas trop, c’est plus commode. Toujours est-il que ses habitudes, son comportement ne sont pas sans rappeler un mode de vie avec lequel les parents de Lorenzo, Camila et Andrés, ont voulu se couper. La drogue, l’alcool ou une la seule insouciance menacent à nouveau le couple et leurs enfants et bousculent quelque peu le modèle fabriqué pour se protéger.
L’amitié timide entre Lorenzo et Caito ainsi que les hésitations sexuelles de Lorenzo sont abordées avec pudeur et sans éclat. Sans doute Martin Deus manque de faire du paysage somptueux (montagnes lointaines, sous-bois, littoral), l’espace mental souhaité (voir le dossier de presse à ce propos). On ne parvient pas véritablement à faire correspondre les sentiments de Lorenzo avec les très beaux plans de nature de la province de Santa Cruz (filmés dans la localité de Los Antiguos). En revanche, alors que le père Andrès est un personnage peu présent (Guillermo Pfening), Camila incarnée par Mariana Anghileri est plus charismatique et beaucoup mieux cernée. C’est elle l’autorité du couple. C’est elle qui a isolé son mari du monde trouble et des influences toxiques dans lesquelles il vivait plus jeune. C’est elle qui a choisi la rudesse de la Patagonie plutôt que la facilité de Buenos Aires. C’est enfin elle qui s’inquiète plus qu’un autre du tort que Caito est susceptible de faire à son foyer.
Mon meilleur ami échoue donc en partie, notamment si l’on prête aux intentions annoncées par son scénariste et réalisateur. L’écriture a ses défauts (personnages négligés, le petit frère avec le père) et les ambiances restent souvent vagues (abandon, inquiétude ou mystère par exemple sont assez peu ressentis). C’est délicat, peut-être un peu trop.