Le dernier samouraï

Edward Zwick, 2003 (États-Unis)




Durant l’ère Meiji, la modernisation du Japon semble s’emballer sous la pression occidentale. Les ambassadeurs étrangers font la queue pour passer des accords commerciaux avec le jeune empereur Mutsuhito. Dans la vague de réformes qui transforment le pays, l’armée nouvellement créée ôte toute légitimité aux samouraïs qui n’ont plus que le folklore pour se retirer. Ce prologue de quatre lignes constitue le contexte du scénario et contient autant voire plus d’informations sur le Japon à la fin du XIXe siècle que ce qu’il est possible d’en apprendre dans le film.

Rien de vraiment historique mais peut-être le récit se rattrape-t-il dans sa capacité à nous captiver ? Non, zéro surprise : des échanges guerriers au baiser américano-japonais, en passant par l’évolution psychologique du héros qui trouve dans l’amour porté pour son ennemi le rachat de ses crimes passés. Récit et ficelles éculés.

Sur la voie du guerrier, Tom Cruise en apprenti samouraï brasse l’air de ses attaques lors des répétitions comme Conan le faisait avec son énorme glaive durant l’Âge hyborien, en 1982 (Conan le barbare de John Milius). La maîtrise de l’art du combat et la spiritualité qui lui est couplée sont atteintes sur les notes d’une flûte japonaise comme jadis dans la série Kung Fu avec David Caradine. Le dernier samouraï était américain ? Mon œil…

Enfin, le film est long et laid (les flash-backs sont lourds de gros effets) et tant qu’à faire les valeurs traditionnelles américaines préservées (la fidélité au chef à condition qu’il soit juste et bon, le modèle d’une famille ici recomposée, mari protecteur, femme, enfant, etc.). Autant d’éléments qui le rapproche du très détestable Patriot d’Emmerich (2000). Conservatisme encore, puisque par dessus tout les samouraïs représentants l’ancien temps résistent selon Zwick au renouveau du pays symbolisé par l’armée modernisée (la lame des sabres contre des mitrailleuses aux cadences impressionnantes). Grâce à Tom et au passé valorisé, l’empereur pantin gagne en assurance et en autorité…

Sauvons avec indulgence la séquence de la dernière bataille où transparaît toute la stratégie guerrière (avantages et inconvénients du terrain, attaques variées, nouvelles armes… ; les fantômes spartiates des Thermopyles sont même invoqués) mais rien dans la mise en scène ou dans le montage n’amène un peu de cinéma dans ces images. Edward Zwick semble apprécier les commandes historiques et peut-être s’en tire-t-il mieux ailleurs (Blood diamond, 2007, Les insurgés, 2009) mais le pire est à craindre de l’adaptation qu’il s’apprête à réaliser du beau roman de G. G. Kay, Les lions d’Al-Rassan.

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