Oliver Stone, 2005 (États-Unis)
Premier parti pris : Alexandre est blond… mais Grand nous rappelle Hollywood
331 av. J.-C., Mésopotamie
Alexandre-Colin Farrell à cheval donne un discours devant son armée rangée prête à attaquer Darius, puis son regard se lève, non à la recherche d’un appui divin, mais de lui-même incarné par un aigle qui le suivra tout au long du film (et cela relève plutôt de l’exploit pour le pauvre volatile, car il y a tout de même près de trois heures de pellicule et un bout de chemin entre la paisible Grèce et les contrées sauvages des barbares de l’Est !). L’aigle incarne donc Alexandre mais aussi bien sûr son futur Empire. Nous le verrons les animaux sont omniprésents dans l’histoire. La caméra nous emporte donc vers le ciel et cet aigle. Le discours d’Alexandre se perd dans les nuages et la caméra propose une vue panoramique plongeante de ¾ haut. Oliver Stone est donc allé chercher loin son prétexte à des vues aériennes de la bataille, qui pris le nom du misérable bourg de Gaugamèles. Pourquoi une vue aérienne ? Pour avoir dans son champs 40 000 fantassins et 7000 cavaliers macédoniens d’un côté et les 200 000 fantassins et 45 000 cavaliers de Darius III de l’autre. Colossale bataille donc que celle qui eu lieu dans la plaine de Gaugamèles (façon Age of Empire) !
Qui est donc Darius d’après le film ? L’ennemi irréductible. Il ne veut pas subir l’amitié d’Alexandre, ni ses vues philanthropiques, ni son homosexualité, ni donner la possibilité au jeune roi de Macédoine de joindre les quatre points cardinaux dans un but purement humaniste : aimons-nous tous et donnons à l’humanité un visage métissé ! Quoi de plus nobles comme ambitions ! Ainsi, Darius est un tyran iraquien qu’il faut chasser au nom de la démocratie et de la liberté des peuples. La démocratie n’est-elle pas la parfaite réussite du si sage peuple grec qu’a su entretenir et préserver à travers les siècles le si noble peuple américain ? Bien sûr Darius est lâche et cède à la terreur face aux gros plans insistants des yeux accusateurs d’Alexandre. Les troupes perses sont défaites par les Macédoniens et Darius fuit. Où ? Dans le désert et les montagnes, peut-être dans quelque caverne d’où il émettra éventuellement pour la presse et les États du monde entier des messages de propagandes terroristes… En vérité, il n’en aura pas le temps, car il se fait assassiner par le fantassin chargé de filmer le message. Ces barbares n’ont aucun sens de la fraternité…
C’est ainsi que les Américains font de la Grèce et de la Macédoine un avant poste pour leur conquête du Proche Orient. L’enjeu n’en est pas encore le pétrole mais l’appropriation d’une Histoire antique et de racines qui ne leur appartient que par les gênants intermédiaires européens.
Deuxième parti pris : Alexandre est homosexuel (entre autres)… et il fait son coming out dans une scène sur deux (certes pas toujours de façon explicite, quoique).
Vers – 325, après d’autres conquêtes plus à l’Est
Le grand conseil des stratèges est réuni. Divers sujets sont abordés dont les ambitions du roi, mais aussi celles de ses puissants généraux qui n’attendent qu’une chose pour y voir plus clair : qu’Alexandre ait un héritier. Un grand empire c’est bien beau mais sans personne à sa tête une fois le roi conquérant décédé, c’est assez gênant… Donc la question d’un héritier est levée.
Réalisation :
- plan 1 serré sur l’intervenant : « Il faut que tu ais un héritier ! » – silence – /
- plan 2 sur le meilleur ami et amant d’Alexandre qui semble un peu embarrassé -silence pesant – /
- plan 3 sur Ptolémée (l’un des sept somatophylaques d’Alexandre ; rassurons-nous de tels mots n’apparaissent pas dans le film) accoudé à la table, sa tête reposant sur la paume d’une main façon « penseur » -silence insoutenable-.
- plan 4 large, intérieur tente : tellement insoutenable que la réunion finit en rixe.
Troisième parti pris : les chats perses sont persans et les lévriers afghans sont afghans.
Outre la symbolique du cheval dressé par Alexandre, alors que son père Philippos lui-même n’y parvient pas, du serpent très attaché à la personne de sa mère, la (trop ?) jeune Angelina Jolie, de l’aigle, Oliver Stone n’oublie pas que chaque pays a son cliché (outre les belles indiennes et les beaux indiens, les derviches tourneurs, les épices et la végétation luxuriante) et place dans un coin de l’écran un chat aux longs poils au regard mystérieux (pour vous signaler au cas où vous auriez rater l’écriteau que vous êtes en pays perse), et un beau toutou au fin museau (pour vous signaler que vous êtes en terre afghane)…
Quatrième parti pris : l’horreur de la guerre
Oliver Stone rend compte de la réalité de la bataille (trauma post Soldat Ryan oblige !) et fait saigner ses figurants (c’est pas peu de le dire !). On déambule donc avec Alex sous les tentes réservées aux blessés de guerre (Alex en achève même un par magnanimité) et on constate que les milliers de victimes rougissent le sol de leur flot de sang. La seconde bataille se déroulant en Inde (vers -324 ?) est bien mieux réussie que la première. Oliver Stone réalise enfin (après deux heures de film il était temps) et optent pour des flous, des saccades, des chocs sur la caméra, des galops assourdissants et surtout des éléphants préparés au combat fonçant droit sur les Macédoniens et leurs alliés, se moquant des arbres qui barrent leur passage (nous sommes en forêt tropicale). Le point de vue est celui du pauvre soldat macédonien qui bien qu’il ait parcouru du pays, découvre ses monstres de guerre annonçant sa mort… Alexandre est projeté à terre (Bucéphale meurt ici) et voit rouge comme la caméra. Une poignée de lourds ralentis accompagne la charge et la chute mais enfin quelques images nouvelles !
p. s. : vous excuserez mes omissions concernant Aristote, les scribes attentifs et asservis de Ptolémée, les ellipses astucieuses d’Oliver Stone lorsque les éléments historiques et la légende font défauts, la v.o. anglaise avec « r » roulé et accents « exotiques » (dublinois ou écossais mais pas vraiment asiatique)…
Super loupé comme film. C’est beau, mais qu’est-ce que c’est chiant. Le film pêche surtout par l’interprétation de l’acteur incarnant Alexandre (vous me pardonnerez d’avoir oublié son nom), dont le charisme est à peu près aussi développé que celui de Garcimore. Nan sérieusement, il est blond, il est beau, mais il donne l’impression d’avoir la tête complètement creuse. J’ai du mal à croire que des milliers de soldats accompagneraient dans une expédition aussi périlleuse et pendant d’aussi longues années, un chef aussi insignifiant.
Par ailleurs, Oliver Stone semble avoir fait une fixette sur l’homosexualité d’Alexandre, qui n’est en aucun cas avérée, mais qui est surtout un bel anachronisme, une vision judéo-chétienne tout à fait mal placée et dont on se contrefout éperdument.
Sinon, la bataille contre Darius est vraiment réussie. C’est beau à en pleurer. Tout ce sable, cette poussière du désert mêlée au sang et à la sueur des combattants… Tenez, ça me rappelle les cours de Pierre Briant. Allez zou, je vais me relire Histoire de l’empire achéménide.
Moi j’ai personnellement adoré cette longue fresque épique de près de trois heures ! Un film que j’ai d’ailleurs déjà vu et revu de nombreuses fois… Les décors, les costumes, l’histoire en elle-même et son déroulement sont absolument magnifiques.
J’ai beaucoup aimé l’accent qui est mis sur le côté à la fois historique et mythologique, évoqué avec le père d’Alexandre lorsqu’ils contemplent des fresques sur les murs d’une sombre galerie. Dans cette grande tragédie grecque, on retrouve d’ailleurs à merveille le mythe d’Oedipe : tuer son père et épouser sa mère… Suggéré par le jeu très réussi d’Angelina Jolie (certes un peu jeune !), qui est absolument à voir en version originale ! Le doublage de la version française étant vraiment horrible (Colin Farrell ayant une voix de jeune ado). Quant aux décors et paysages, j’en ai pris plein la vue, notamment lors des batailles, véritables fresques vivantes. Du grand et beau cinéma comme je l’aime, malgré sûrement quelques imperfections historiques, mais qu’importe…
Je suis vraiment rentré dans le film et me suis laissé transporter d’un bout à l’autre dans un voyage à travers le temps signé par le grand Oliver Stone, et même si dans le genre j’ai préféré le fabuleux Kingdom of Heaven (Ridley Scot, 2005), Alexandre est, selon moi en tout cas, très réussi et bien mieux que Troie (Wolfgang Petersen, 2004) par exemple.
Le film d’Oliver Stone, Alexandre, est sorti sur les écrans en 2004 : dernier avatar cinématographique du conquérant macédonien. L’espace hollywoodien sur ce sujet très typé étant réduit, le projet concurrent de Baz Luhrmann avec Leonardo Di Caprio et Nicole Kidman a été abandonné.
L’épopée d’Alexandre a déjà inspiré plusieurs films, soit à Hollywood soit à Bollywood.