Richard Linklater, 2019 (États-Unis)
Dans la périphérie huppée de Seattle, coincée dans sa villa grand standing, Bernadette défait les paquets Amazon remplis de ses caprices tout en profitant des facilités que lui procurent Apple et Microsoft. Son inépuisable débit de paroles, quand elle est seule, traduit une angoisse, un trop plein qui ne comble rien. Son mari estampillé « Recherche et Développement » chez Microsoft est une personne… très occupée. Elle, n’a que sa fille et la gloire passée de l’architecte entreprenante qu’elle a été. Le film porte sur une artiste rongée par un échec qu’un portrait d’elle vu sur YouTube va faire tergiverser. Bernadette broie du noir et il n’y aura que les vastes étendues blanches du pôle Sud pour l’apaiser. C’est vrai que l’Antarctique sur un coup de tête, ça a de la gueule.
En fait, là, tout de suite (période Covid durant laquelle tout est fait pour préserver les flux essentiels), on n’est pas très sûr de vouloir de cette histoire de riches. Richard Linklater fait un film tout confort, avec des décors très chouettes (la maison à l’image de Bernadette), des acteurs très bien (Cate Blanchett, Billy Crudup, Emma Nelson, Kristen Wiig, Laurence Fishburne…), des personnages sympas, de l’humour et une happy end. Mais, la gêne vient de l’étalage du modèle économique et de la complète adhésion à ce modèle (seule la vedette de télévision est caricaturée, mais, plus imbécile que les personnages principaux, on se demande si on n’aurait pas pour elle davantage de sympathie). Pas la moindre remise en question des choix de vie, aucun changement d’échelle. Il n’y a que l’individu et son ego, et même pire, si l’on ajoute à cela la conquête du Pôle Sud par l’installation d’une base américaine high-tech et très design.
Ce que dirait Jack Black (Rock academy, 2003), c’est comme si Linklater avait finalement cédé au boss. Ou, pour justement ne pas citer un film de studio, c’est comme si Richard était progressivement passé de Slacker (1991) à employé modèle pour le système.
Je le note. J’aime bien Cate Blanchett. D’ailleurs dans le film de Woody Allen Blue jasmin
elle avait déjà un rôle similaire de femme vivant dans le luxe et qui dégringole soudainement.
Même si le film de Linklater est très plaisant, réussi formellement, confortable, je pense que Blue jasmin est meilleur (je crois me rappeler qu’il était plus pessimiste aussi ?).
Mais je trouve les malheurs personnels de ces gens bien installés très éloignés de nos préoccupations. Linklater s’intéressait à une autre frange de la population dans les années 1990… Même plus récemment, dans Boyhood ou Last flag flying, il fait le portrait de personnes modestes qui peinent à s’en sortir. C’est peut-être ça qui manque surtout à Bernadette, de la modestie.
Oui Blue jasmin finit plutôt mal pour son héroïne qui refuse de se confronter à la réalité. Son seul objectif étant de retrouver un mari argenté qui découvre ses mensonges au final. Très bien interprété.
Pour revenir à Bernadette a disparu, c’est vrai que c’est un film qui à l’air de ne mettre en avant que les valeurs de l’argent, un côté un peu indécent faut reconnaître par les temps qui courent.
Je note les autres films de ce réalisateur. Merci.
Si tu as un temps à consacrer à Richard Linklater et si tu ne connais rien de son cinéma, il faut que tu vois, toute affaire cessante, Boyhood. Et/ou, si tu as davantage de temps, la trilogie des Before (Sunrise, sunset et midnight). Ces films sont sensibles, redéfinissent le temps qui passe et te laissent dans une langueur qui n’est pas désagréable du tout.
Ça me fait penser à Jarmusch, de ses premiers films qui suivaient des paumés, des esseulés, des pas glorieux, à ses vampires parfois décriés, nantis et misanthropes. Bernadette aussi est une misanthrope.
Il y a quand même une différence avec Linklater, les vampires de Jarmusch, eux, restent marginaux, ce que n’est absolument pas Bernadette.
Ça marche. C’est noté. Merci beaucoup.
Un petit film qui se croit grand… 1- la pauvre Bernadette a des soucis de riche, tous les travailleurs se mettraient en dépression pour si peu… 2- Le côté inspiration et du rapport de l’artiste à son art est beaucoup plus intéressante mais sous-exploitée.
Finalement c’est très ennuyeux malgré une seconde partie un peu plus attrayante