Jacques Tourneur, 1944 (États-Unis)
Toujours aux Etats-Unis, Jacques Tourneur met de côté quelque temps le fantastique (La féline, 1942, L’homme léopard, 1943) pour saisir sur pellicules un récit moins surprenant dans une mise en scène vaguement hitchcockienne.
Allida Bederaux (Hedy Lamarr) inquiète son mari (Paul Lukas) qui par conséquent, mais avec discrétion, demande l’avis du respectable docteur Huntington Bailey à son sujet (George Brent). En imaginant la jeune femme dans un champ de marguerites et envoûté par un portrait la représentant, Bailey tombe sous le charme. Ça tombe bien le mari s’avère être un monstre.
Le principal attrait d’Angoisse réside dans l’insertion du fantastique en filigrane : l’entrée en matière (le train lancé dans la nuit pendant qu’un orage strie le ciel de ses éclairs), le motif du portrait qui paraît doté d’un pouvoir obscur (le tableau d’Allida, le buste géant à l’allure de gorgone), un escalier dérobé, une mort soudaine et des secrets révélés. Même la clairvoyance de Bailey ou la folie du mari ajoutent au mystère.
Malgré son charme (pensons à l’atmosphère et aux évocations psychologiques*), nombreux reconnaissent qu’Angoisse est mineur dans l’œuvre de Tourneur. Son dénouement est un peu hâtif. Le souvenir du film s’estompe vite (même si l’explosion de la maison est impressionnante) et la comparaison avec Hantise de Cukor (dont le sujet est proche et sorti la même année dans les salles américaines) ne le met pas en valeur.
* Le médecin fait appel à la psychologie pour éclairer le comportement d’Allida et, un peu comme dans La maison du docteur Edwardes l’année suivante, il est amusant d’entendre la discipline presque présentée comme une nouveauté scientifique.
Il y a aussi Le Château du Dragon de Mankiewicz de1946, qui possède un peu la même ambiance en plus gothique.
Tu ne crois pas si bien dire, je vais voir ce film ces jours-ci, il vient de m’être prêté.