Un éléphant ça trompe énormément

Yves Robert, 1976 (France)

Jean Rochefort excelle dans la peau de celui qui se voit en dandy, chef du bureau de l’information au ministère mais informé de rien, marié deux enfants, heureux sans le savoir et violemment remué par un caprice passionnel aux jambes exquises (Anny Duperey, la femme à la robe rouge). Étienne est partagé entre sa vie de famille (il est l’époux de Danièle Delorme) et ses rocambolesques envies. Celles-ci, qu’il laisse pleinement s’exprimer quel que soit le danger qu’elles représentent et dont il est pourtant conscient, troublent maintenant son quotidien (ne le prévient-on pas ? « Les femmes sont toutes des hyènes ! »). La femme en rouge fait de l’équitation ? Il chausse des bottes qu’il n’a pas ôtées de leur étui depuis 1958 et monte un cheval dont la complicité reste, en dépit de toute sa bonne volonté, plutôt capricieuse. La femme en rouge l’invite à Londres pour un soir ? Étienne redouble d’efforts, prétexte à son épouse une intolérable et nécessaire réunion, mais comme empêché par le destin, son avion est pris dans des intempéries qui l’obligent à se poser entre Paris et Londres, à mi-chemin de l’une et de l’autre… Les scénaristes l’ayant placé dans des situations extravagantes, son attitude amuse (la petite mélodie au piano de Vladimir Cosma et les cris de mouettes partout l’accompagnent dans ses rêveries). Les commentaires qu’il donne en off sont réjouissants (les textes sont signés Jean-Loup Dabadie). Gravitent autour de Rochefort d’autres personnalités qui, même sans être de son niveau, contribuent tous au burlesque du film : Guy Bedos, le médecin petite nature, Claude Brasseur, à la sexualité diversifiée, et Victor Lanoux, la brute machiste. Les seconds rôles ne sont pas en manque : Marthe Villalonga à la tonicité endiablée et Christophe Bourseiller dont l’atonie n’a d’équivalent que sa ténacité à faire la cour à Danièle Delorme (notons une simple apparition d’Anémone et de Jean-François Dérec). Tout le monde trompe tout le monde mais personne, à part peut-être Étienne, n’est complètement dupe. Un éléphant ça trompe énormément et sa suite Nous irons tous au paradis (1977) font partie des réussites d’Yves Robert (La guerre des boutons, 1962, Le grand blond avec une chaussure noire, 1972, Le retour du grand blond, 1974). Les Américains ont voulu s’approprier ce succès mais La fille en rouge (Gene Wilder, 1984) demeure complètement inconnu.

Une réponse à “Un éléphant ça trompe énormément”

Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *

*